En fuite après avoir tenté de dissoudre le Parlement pour sauver son mandat, Andry Rajoelina fait désormais partie du passé récent malgache, après son exfiltration par la France. L’armée s’est d’abord engouffrée dans la brèche et a annoncé mercredi, la formation d’un Conseil de défense nationale de transition. La Haute Cour constitutionnelle avait alors entériné le processus, en nommant le colonel Michael Randrianirina président par intérim. Ces événements se sont déroulés dans un contexte extrêmement tendu. En cause, les manifestations dans tout le pays, où les populations souhaitent les services essentiels: à savoir la fourniture en eau potable, et l’arrêt des délestages pour une électricité stable. En réponse aux manifestations, l’ancien Président de la République malgache Andry Rajoelina, avait alors ordonné aux forces de l’ordre de procéder aux arrestations et de tirer sur ses compatriotes.
Son remplaçant âgé de 51 ans lui aussi, ce militaire jusque-là inconnu du grand public, s’était alors illustré quelques jours plus tôt, en appelant à la fin des violences contre les manifestants. Il promet désormais un référendum constitutionnel et des élections générales d’ici deux ans, pour remettre le pouvoir à un civil. L’île de Madagascar était en proie à une crise depuis le 25 septembre 2025, une crise sociale devenue rapidement une crise politique. La jeune génération nommée “Gen Z” malgache avait alors manifesté en masse.
Selon les Nations Unies, au moins 22 personnes ont été tuées et plus d’une centaine ont été blessées. Ce bilan a été démenti par l’ancien chef de l’État malgache Rajoliena qui évoquait 12 morts, tous des pilleurs, des casseurs, selon lui. En outre, le Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’homme Volker Türk s’était dit le 29 septembre, choqué par la réponse violente aux manifestations. Outre le gaz lacrymogène et les balles en caoutchouc, certains officiers ont utilisé des balles réelles, selon l’ONU. Les forces de sécurité ont accusé certains manifestants de mener des actions violentes et des pillages.
De plus, la situation a commencé à basculer samedi 11 octobre, lors de la plus importante manifestation depuis le début de la contestation. Une unité militaire d’élite majeure, le Capsat (Corps d’armée des personnels et des services administratifs et techniques), a fait défection au pouvoir en place. Ce contingent de l’armée malgache a appelé les forces de sécurité à refuser les ordres de tirer sur la population.
La Grande Île Madagascar a une longue histoire de soulèvements populaires, depuis son indépendance obtenue de la France en 1960. Des soulèvements, déclenchés par des situations économiques et sociales déplorables, qui ont été suivis par la mise en place de gouvernements militaires de transition. Mais surtout, le scénario se répète car le président destitué, Andry Rajoelina, avait lui-même accédé au pouvoir par un coup d’Etat en 2009 dans des circonstances similaires.
L’appauvrissement s’aggrave de jour en jour. Bien que l’île soit riche en ressources naturelles, et qu’elle ait enregistré une croissance de 4,2% en 2024, près des trois-quarts de ses 32 millions d’habitants vivaient sous le seuil de pauvreté en 2022, selon les chiffres de la Banque mondiale.
Qui est Michael Randrianirina ?
Commandant du Corps d’appui à la protection des institutions (Capsat), Michael Randrianirina fait partie des militaires qui avaient permis l’accession au pouvoir d’Andry Rajoliena en 2009. En 2025, il le lui arrache, à la suite d’un soulèvement populaire. Ce haut gradé s’est voulu très clair: il ne souhaite pas garder le pouvoir. Le plus urgent est d’établir une transition qui durera deux ans, puis transmission à un civil après l’organisation d’élections transparentes. Formé à l’académie militaire d’Antsirabe, il a été gouverneur d’Androy entre 2016 et 2018, puis est devenu chef d’un bataillon d’infanterie dans la ville de Toliara jusqu’en 2022. Bien que ses antécédents familiaux ne soient pas connus, il est réputé rigoureux, discipliné et légaliste.
Devenu un critique virulent ces dernières années du régime Rajoelina, il était devenu encombrant pour le gouvernement. En novembre 2023, soupçonné d’avoir incité l’armée à se mutiner, il avait été arrêté, inculpé, traduit en justice et envoyé en prison le jour même. Libéré en février 2024, après une condamnation à une peine avec sursis pour atteinte à la sécurité de l’État, il avait finalement retrouvé les rangs du Capsat. La nouvelle direction militaire devrait rapidement nommer un nouveau Premier ministre, pour former un gouvernement de consensus.













